Rapport sur les opérations de police lors de la mobilisation contre l’A69 les 4, 5 et 6 juillet 2025

Observatoire toulousain des Pratiques PolicièresObservatoire des Pratiques Policières du Tarn

Les observatoires toulousains et tarnais ont suivi la mobilisation contre l’A 69 sur le site de Maurens – Scopont dans le Tan début juillet 2025.

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Synthèse

Après un arrêt des travaux sur l’A69 suite à un jugement tribunal administratif de février 2025, puis une reprise de ceux-ci issue d’un autre jugement en date du 28 mai, la rencontre des 4, 5 et 6 juillet qualifiée de « Turboteuf » décidée suite au premier jugement, était annoncée festive.

L’analyse de cette manifestation, conçue comme une recherche participative, est l’occasion pour comprendre :

— Les formes et les effets du discours criminalisant du Préfet du Tarn et du Ministre de l’intérieur sur les « groupes de barbares », des « fichés S » (…) qui ne veulent que détruire ou casser du flic »…  clamés dans tous les médias plusieurs jours avant et pendant l’événement. Ces discours assimilant écologistes et éco-terroristes, telles des prophéties auto-réalisatrices et déjà présents dans les précédentes manifestations de Sainte-Soline contre l’A69, ont légitimé à l’avance l’ensemble des actions visant à réduire les libres expressions contre un projet qualifié d’écocide par les associations.

Ces discours catastrophistes et alarmistes, largement repris par la Presse, ont perduré tout le week-end. Pourtant, les observateur·es ont été témoins de la présence de policiers infiltrés, déguisés en « zadistes », dans la manifestation et les réunions préparatoires. Donc, parfaitement au courant des intentions pacifiques des manifestant·es , les autorités ont dupé la presse et la société civile. Ce rapport en fait état.

— L’hyper-militarisation de l’espace où les citoyen·nes qui expriment leur opposition au projet sont nommés ennemis, adversaires et accusés de vouloir « casser du flic » et de basculer « dans la sédition et l’ultra-violence ». Les autorités ont mis en place un dispositif de sécurité exceptionnel: plus de 1 500 gendarmes et policiers selon la préfecture, des véhicules blindés, hélicoptères, drones, avion, canons à eau, équipe cynophile, encerclement du site du château de Scopont avec de nombreuses fouilles et interdiction stricte des manifestations sur un large périmètre. Plus de 100 grenades ont été tirées dont un bon nombre au milieu des manifestant·es.

La gestion sécuritaire de la Turboteuf, qui a rassemblé un petit millier de manifestant·es, confirme une transformation profonde du rapport entre État et contestation : ce n’est plus l’acte violent qui justifie la répression, mais la simple possibilité de résistance collective. En criminalisant l’écologie politique, le gouvernement participe à réduire les marges de la démocratie, tout en façonnant une opinion publique conditionnée et alarmée par des menaces souvent inexistantes.

Pour les rédacteurs·trices de ce rapport, la dénonciation de ces logiques autoritaires ne relève pas d’une posture idéologique mais d’un constat partagé par nombre d’observateurs indépendants, juristes et ONG ; et ceci jusqu’au rapporteur spécial de l’ONU. En cela, la gestion policière de la « Turboteuf » n’est pas un épiphénomène, mais bien un symptôme d’une dérive structurelle.

Les entraves au Droit de manifester et au travail d’observation des pratiques policières

Outre les multiples entraves, dont la manipulation par la peur, pour empêcher les manifestant·es de rejoindre l’événement qui avait lieu dans un lieu privé suite à son interdiction par le Préfet, les policier·es et gendarmes, sur ordre, ont aussi entravé la mission des observateur·es indépendant·es de l’OPP ; notamment et leur confisquant leur matériel de protection (casques, masques et lunettes de protection…). Ce faisant, Préfet et ministre s’opposent aux recommandations officielles notamment le « Pacte international relatif aux droits civils et politiques des Nations Unies » du 17 septembre 2020 ».

Ce rapport est aussi l’occasion de rappeler le rôle des Observatoires des Libertés Publiques et /ou des Pratiques Policières qui, à l’instar de l’Observatoire Toulousain se sont développés en France (une quinzaine d’observatoires existent en 2025). Le dernier s’est créé dans le Tarn, autour des mobilisations contre l’A69. Conformément aux recommandations de l’OSCE (l’Organisation pour la Sécurité et la Coopération en Europe), et du Bureau des Institutions Démocratiques et des droits Humains (Commission de Venise), les observateur·es adoptent en permanence une « neutralité comportementale » face aux actions observées, iels ne prennent jamais part aux manifestations et tous les faits rapportés dans les rapports ont été observés par les membres des OPP ou relatés dans des témoignages vérifiés et attestés. Les observations examinent, entre autres : la légitimité et la nécessité de l’engagement ou au non-engagement de la force, la proportionnalité de cet usage, la redevabilité, l’action de rendre des comptes ; donc y compris permettre l’évaluation des actions de maintien de l’ordre par les observateur·es indépendant·es. Ces différents critères sont utilisés par les organismes internationaux pour évaluer, entre autres, l’utilisation de moyens coercitifs et répressifs pouvant conduire à la remise en cause des libertés individuelles et collectives.

A ce propos, il sera intéressant, disent les observateur·es de Toulouse et du Tarn de connaître a posteriori les justifications du Préfet Buchaillat sur ces opérations de police et de gendarmerie durant cette première semaine de juillet, sur la nécessité d’engager la force, sur la proportionnalité de celle-ci par rapport à la situation objective sur le terrain. Cela s’appelle la redevabilité. C’est, comme la nécessité, comme la proportionnalité, l’un des principaux critères mis en avant par les organismes internationaux pour analyser les pratiques policières ainsi que le respect de la liberté de réunion et de manifestation.

Ce rapport se termine par une « Adresse aux policiers, gendarmes et autres membres

des forces de l’ordre » qui explique en quoi l’observation citoyenne n’est en aucune manière dirigée contre eux et elles, mais au service de libertés d’expression que nous avons toutes et tous à protéger pour sauvegarder notre démocratie.

Pour tout contact : opp.toulouse@gmail.com

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