La Ligue des droits de l’Homme de Toulouse s’est, en janvier 2011, engagée dans une action citoyenne à rebonds : l’observation des comparutions immédiates au tribunal de Toulouse.
Durant cinq mois, de février à fin juin, ce sont plus de 100 jours d’audiences, pour plus de 500 affaires qui ont fait l’objet de présences, écoutes, mises en mémoires et analyses détaillées par une quarantaine d’observateurs, membres de la LDH, d’Amnesty international, des enseignants de l’université du Mirail, des étudiants.
Premier rebond : aux éditions Erès, un livre collectif donnant résultats et analyses sort en librairie début mars 2012. Il sera préfacé par Serge Portelli et contiendra aussi des contributions de magistrats, avocats, militants des droits de l’homme (voir ci-dessous)
Au travers d’un système, celui des comparutions immédiates, sera donné à voir et comprendre un processus de justice expéditive, une machine à juger les pauvres avec pour principale sanction la prison et l’enfermement.
Deuxième rebond, et c’est lui l’objet de notre appel à coproduction citoyenne et artistique : une pièce Théâtre Témoin, « Chroniques de justice des ordinaires, les comparutions immédiates à Toulouse ».
Un texte pour la scène entièrement composé des écrits des observatrices et observateurs, mis en scène et joué par plus de dix d’entre elles et eux, acteurs témoins de leur propre expérience humaine et citoyenne.
Une pièce qui sera travaillée puis représentée fin mai 2012 dans deux lieux culturels de Toulouse : La Fabrique, université du Mirail, et Mix’art Myris, collectif d’artistes et de création.
Une création pour laquelle l’ensemble de l’équipe s’engage en bénévolat mais qui nécessite un investissement financier pour la réalisation d’une scénographie originale – achats de matériaux, locations vidéo, rémunération d’un technicien lumière et plateau – et de moyens d’information et communication.
Pour cela, il nous faut réunir 5 000 euros.
Et nous vous sollicitons…
Votre participation, quel qu’en soit le montant financier, est plus que précieuse et participe d’une exigence belle et rebelle à créer et à vivre.
Si vous pensez pouvoir soutenir cette action, nous vous serons obligés de l’adresser, par chèque à l’ordre de la Ligue des droits de l’Homme,
à
2, rue Saint Jean, 31000 Toulouse
D’avance, soyez en remerciés !
Très cordialement
NB : votre contribution sera fiscalement assimilée à un don en faveur d’une association, générateur d’une réduction d’impôt de 66%
La Ligue des droits de l’Homme de Toulouse annonce la publication prochaine de :
Comparutions immédiates : quelle Justice ?
Regards citoyens sur une justice du quotidien
Ouvrage coordonné par Daniel Welzer-Lang & Patrick Castex
(en collaboration avec Américo Mariani, Frédéric Rodriguez, Sébastien Saetta, Rémi Cochard, Hervé Dubost) ; éditions Erès (Toulouse)
L’Observatoire des comparutions immédiates de Toulouse a été créé par la Ligue des droits de l’Homme de Toulouse, associée à des universitaires. Du 1er février au 30 juin 2011, 47 auditeurs et auditrices ont observé 543 affaires, au terme de 112 audiences, auditionné avocat-e-s, magistrats, professionnel-le-s du droit. Seul le procureur de la République a refusé que ses substituts soient entendus. On ne saura donc pas pourquoi dans 63% des cas le parquet demande de la prison ferme. Comment se fait le « pré-jugement » qui fait que certain-e-s passent en comparution immédiate (procédure la plus rapide et la plus répressive) et pas les autres.
Des observations réalisées et de l’étude statistique il ressort nettement que cette procédure revêt un caractère expéditif (les affaires sont jugées en 36 minutes en moyenne), peu respectueux des droits des personnes prévenues ET des victimes. Cette procédure met à mal les principes de la justice républicaine : procès équitable, présomption d’innocence, individualisation et sens de la peine.
La population étudiée est surtout jeune, pauvre, précaire et masculine (95% des affaires), souvent en mauvaise santé ; les « mauvais pauvres » disent les auteurs. Plus de la moitié d’entre-elle est « colorée » (« Blacks », « Beurs »). Mais contrairement au discours sécuritaire, outre les étrangers en situation irrégulière, « sans papier », les jeunes noirs et maghrébins sont plus impliqués dans des délits sans violence, moins concernés par les atteintes aux biens et aux personnes. Contrôles au faciès et politique du chiffre imposée aux services de police expliquent en grande partie leur présence dans ce tribunal. Pourtant, dès qu’ils ou elles ont un casier judiciaire avec plus de trois condamnations, et de manière discriminatoire, ils/elles sont plus envoyé-e-s en prison que les autres. Les analyses montrent le rôle central du casier judiciaire, marqueur objectif de la délinquance pour certains, mais surtout marqueur social de la petite délinquance de pauvreté.
Les récidives montrent l’échec de la prison et de l’exemplarité de la peine. Et pour certains délits, notamment les délits de circulation, les violences conjugales, comme les atteintes aux biens, la récidive après une peine de prison est massive. Bras armé de la politique pénale, la judiciarisation du quotidien que sont les comparutions immédiates montre surtout les effets destructeurs de la pauvreté, du non-accès au système de santé.
L’analyse des affaires après et avant le 15 avril 2011 (date de la réforme de la garde à vue), comme la comparaison des chiffres entre Lyon (Conseil lyonnais pour le respect des droits) et Toulouse, montre un « effet système » qui semble s’imposer à l’ensemble des acteurs et actrices de la chaine pénale des comparutions immédiates ; « effet système » qui pourrait bien relativiser le rôle des Citoyens assesseurs dont on nous dit qu’ils et elles vont révolutionner la justice.
Le livre est aussi enrichi par les apports de responsables de centre de réinsertion pour sortants de prison, d’association pour femmes victimes de violences, d’avocats et magistrats. Serge Portelli, Gilles Sainati, magistrats et Laurent Mucchielli sociologue, qui ont développé des analyses sur les comparutions immédiates et sur le thème de l’insécurité ont aussi contribué à cet ouvrage.
Sortie nationale en mars 2012
Editions ERES
300 p.